Télévision : 30 septembre à 08:14-10:03 sur Canal +
film : comédie dramatique
Sophia est professeure de philosophie dans une université du troisième âge à Montréal. Depuis dix ans, elle partage la vie de Xavier. Sylvain, lui, est charpentier dans les Laurentides et doit rénover le chalet que le couple vient d'acheter dans la région. Sophia se rend seule sur place pour un rendez-vous avec lui. Le coup de foudre entre eux est immédiat. Mais tout sépare les deux jeunes quadragénaires. Sophia est une véritable citadine issue d'un milieu bourgeois alors que Sylvain est un homme de la campagne qui a grandi dans un milieu modeste. La passion naissante entre eux survivra-t-elle à leurs différences ? - Critique : Il est beau, bien bâti, et Sophia va l’avoir dans la peau. Sylvain est un gars de la campagne, simple, généreux, chaleureux, charpentier de profession. Sophia, professeur de philosophie à Montréal, en couple depuis dix ans avec un intellectuel comme elle, rencontre le « manuel » dans sa résidence secondaire, un chalet où il doit venir faire des travaux. Passé quelques verres au bar du coin et un slow, voilà la citadine qui succombe. Le désir ardent n’attend pas. Le premier baiser, dans la voiture, est un régal de mise en scène malicieuse. Un jeu de cache-cache avec un rétroviseur qui dissimule habilement le haut des visages et les yeux pour mieux révéler la farandole des langues. Aucun doute, il s’agit bien d’un french kiss. La volupté de chaque scène d’amour fait assurément partie des atouts de Simple comme Sylvain. Exaltant, drôle, énergique et mélancolique : à quand remonte le dernier film offrant un tel cocktail ? Monia Chokri, l’autrice québécoise, réussit là le coup parfait, une comédie tout aussi romantique que charnelle, qui s’appuie sur une base sociale solide. L’infidélité de Sophia ne s’arrête pas à une nuit, et sa passion pour Sylvain remet soudain en question beaucoup de choses. Un monde pourtant les oppose. Le menuisier musclé à casquette pense parfois des horreurs (sur la peine de mort), peut dire des énormités (« Les fruits, c’est pour les femmes »), mais aussi trouver la déclaration d’amour absolue — « Tu me donnes envie de vivre. » À son contact, la prof monte au septième ciel, rajeunit, redevient une midinette naïve, s’étonne de tout, apprend la tolérance. Lorsqu’il lui déclame Michel Sardou, elle croit à du Rimbaud. Échapper à l’entre-soi Quid alors des conversations si enrichissantes avec son Xavier, brillant et spirituel ? Va-t-elle le quitter ? Et quid de la famille, des amis ? Le grand chambardement émotionnel vécu par Sophia (prestation lumineuse de Magalie Lépine-Blondeau, pleine d’aplomb) s’accompagne d’une plongée sociologique jubilatoire. Qui se traduit par des scènes de repas ou de fêtes, aussi bouillonnantes que tendues, où tout le monde parle ensemble sans forcément s’écouter, où les dialogues se chevauchent, comme dans la vraie vie. Monia Chokri a du talent pour orchestrer ces échanges. Elle filme avec la même aisance le milieu de Sophia (bourgeoisie cultivée) que celui, nettement plus fruste et modeste, de Sylvain. Sur les différences sociales, le film reste très piquant. Capable de citer à la fois Scorpions, Schopenhauer, Michel Sardou et Damien Hirst, la cinéaste se moque avec la même tendresse des snobs et des beaufs. Elle pointe les préjugés de chacun, l’arrogance de classe, y compris celle qui s’ignore. Le tout dans un mouvement enlevé, bigarré, où les balades sentimentales à la mer ou dans la neige, l’image à grain épais et les zooms, font penser au cinéma lyrique des années 1970… Lyrique et fédérateur comme une chanson populaire, Simple comme Sylvain permet à chacun de fantasmer ou de se reconnaître à sa guise. Ouvert à tous, le film relève le défi qui s’offre à son héroïne : échapper au déterminisme social et à l’entre-soi.
Année : 2023
Avec : Christine Beaulieu, Francis-William Rhéaume, Guillaume Laurin, Guy Thauvette, Linda Sorgini, Magalie Lépine, Marie-Ginette Guay, Mathieu Baron, Micheline Lanctôt, Monia Chokri, Pierre-Yves Cardinal, Steve Laplante