Anouk Grinberg : derniers films au cinéma

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Mercredi dernier
 

Heureux gagnants

Cinéma : 13 mars

Année : 2024

De : Maxime Govare, Romain Choay

Avec : Audrey Lamy, Fabrice Eboué, Anouk Grinberg, Pauline Clément

Récemment en mars
 

L'Amour et les Forêts

Télévision : 8 mars à 14:22-16:04 sur Canal +

film : drame

Lors d'une soirée, Blanche rencontre le beau Grégoire dont elle tombe aussitôt amoureuse. La jeune femme, qui vit au bord de la mer avec sa mère et sa soeur jumelle, décide très vite de passer un cap en acceptant la proposition de son amoureux d'emménager avec lui dans l'Est de la France. D'abord fusionnelle et idyllique, la relation du couple change après la naissance de leurs deux enfants. Blanche découvre une facette de son mari qu'elle ne soupçonnait pas jusque-là. Grégoire devient possessif et très jaloux, allant jusqu'à espionner ses moindres faits et gestes, transformant sa vie en enfer... - Critique : Le patronyme trompe son monde, qui fait de Grégoire Lamoureux (Melvil Poupaud) un amoureux par définition. Tel un prince nommé Charmant, le voilà qui emballe Blanche Renard (Virginie Efira), l’épouse, et la déracine aussi sec. Au revoir la côte normande, Rose la sœur jumelle et le bleu de la mer ; bonjour les mystères de l’Est, Metz, Nancy et leurs profondeurs d’émeraude. L’Amour et les Forêts (titre sublime) s’ouvre sur cette esquisse de conte auquel ne manque que le loup. Lequel va sortir du bois et percer bientôt sous la peau du gentil mari, puisque le film, comme le roman à succès d’Éric Reinhardt dont il est adapté, narre l’emprise d’un homme toxique sur sa victime réduite à feu doux. Sujet actuel et, semble-t-il, inépuisable, l’enfer conjugal se révèle rarement aussi percutant, à l’écran, que lorsqu’il embrasse le cinéma de genre, option western domestique (Jusqu’à la garde, de Xavier Legrand, 2018), science-fiction féministe (Invisible Man, de Leigh Whannell, 2020) ou comédie musicale pour marionnette (Annette, de Leos Carax, 2021). En s’aventurant du côté du thriller, Valérie Donzelli réussit son coup avec ce sixième long métrage sélectionné à Cannes Première, huit ans après la déconvenue de Marguerite et Julien en compétition. C’est son meilleur depuis le mélo pop La guerre est déclarée (2011). Question de style, de stylisation même. Sur un scénario coécrit avec Audrey Diwan (L’Événement), qui tord le cou au récit d’origine en lui offrant une issue radicalement différente, la cinéaste pulvérise le réel et préside à la collision d’univers disparates. Un peu comme si elle croisait Demy, Rohmer et Hitchcock, mâtinant leur rencontre d’un zeste flamboyant de giallo à la Dario Argento en procédant par éclats de couleur – beau travail du directeur de la photographie Laurent Tangy. Demy, donc. Rien ne dit que ces jumelles soient nées sous le signe des Gémeaux. Il n’empêche. Blanche est blonde, romantique, attentiste, quand Rose (Efira itou) penche vers le vénitien et se distingue par sa vivacité entreprenante. Loin de Rochefort mais près des flots, les frangines incarnent le jour et la nuit réunis autour d’un astre maternel échappé du Rayon vert (Marie Rivière, transfuge rohmérienne, comme Poupaud). Demy à nouveau : un voile de mariée, le temps d’un plan, convoque la Geneviève des Parapluies de Cherbourg. Demy toujours : muté à Metz, l’employé de banque Lamoureux conduit Blanche, enceinte, vers cet ailleurs en entonnant une déclaration chantée. « À notre nouvelle vie, qui commence aujourd’hui / On s’aime pour la vie », tralala incongru qui ne se répétera pas. Fausse piste. Très tôt, le montage a livré un fait d’importance : cet amour fou se raconte à l’imparfait. « Il était insatiable et d’une tendresse infinie », confie l’intéressée pour expliquer son ravissement passé. Sous la plume d’Éric Reinhardt, elle échangeait par mail avec un écrivain. Chez Donzelli, elle s’ouvre à une femme incarnée par la merveilleuse Dominique Reymond, aînée rassurante, empathique gardienne de la loi – on pense au personnage d’Anouk Grinberg dans La Nuit du 12, de Dominik Moll (2022). Blanche lui raconte l’isolement progressif, les mesquineries incessantes, la surveillance jalouse. Dans ses souvenirs, les couleurs des jours heureux – jaune soleil, rouge désir – s’assombrissent, jusqu’à la terreur filmée comme un trou noir : Lamoureux emporte sa femme pied au plancher, tous phares éteints, sur une petite route engloutie par la nuit. Image persistante d’un anéantissement. L’espoir viendra du vert, soit une parenthèse érotique délicatement mise en scène, sensuelle et floue, dans les bras d’un homme des bois déniché sur Internet (pseudo Davidroute66, dépaysement garanti) qui possède le physique et la voix (aaaaah) de l’acteur-chanteur Bertrand Belin. Une incartade payée au prix fort, dans le secret du domicile où Grégoire mène les interrogatoires, cette maison seventies où le papier peint et les meubles entrechoquent les époques, produisant un effet troublant d’atemporalité. La chambre du couple, perchée sur une mezzanine fermée par un rideau, s’apparente à une scène de théâtre. Une tragédie s’y joue, un crime peut-être. Le rythme s’accélère, la menace contamine les lieux, et Valérie Donzelli, en fan de Psychose, laisse entrevoir le désespoir de son héroïne à travers le kaléidoscope d’un rideau de douche. Très docteur Jekyll et mister Hyde, Melvil Poupaud n’y va pas mollo, à raison, et transforme le « mec parfait » initial en hideux « petit monsieur », jusqu’à s’effrayer de son propre reflet dans le miroir. Dédoublée comme en écho à Madeleine Collins (Antoine Barraud, 2021), prof de lettres comme dans Les Enfants des autres (lire ci--dessous), Virginie Efira arrive à ce stade d’une carrière où les beaux rôles dialoguent les uns avec les autres. Star de proximité, elle oscille ici entre l’ombre et la lumière avec mille variations subtiles. Prof au grand cœur, un rôle qui va si bien à Virginie Efira…C’est encore la rentrée des classes pour Virginie Efira, qui rempile donc en professeure de français dans L’Amour et les Forêts après en avoir joué une dans Les Enfants des autres, en septembre dernier. Un même métier, vu sous son jour le plus gratifiant, exercé avec cœur, et qui offre, dans les deux cas, une clé intime des personnages.Privée de maternité, l’héroïne de Rebecca Zlotowski trouvait dans l’enseignement l’opportunité d’une transmission aussi précieuse pour ses élèves que consolatrice pour elle – d’où l’émotion de la séquence finale, quand un ancien disciple lui témoignait sa reconnaissance. Également « prof préférée » des lycéens, au point qu’ils lui organisent une fête surprise, la Blanche de Valérie Donzelli exprime tout autre chose par cette vocation : sa dimension romanesque. « C’est ce que j’ai toujours voulu faire », confie-t-elle au début à l’idéal Lamoureux, avant de lui citer Britannicus de mémoire. Les livres constituent à la fois son bagage (signifié, très littéralement, par des cartons à déménager), son habitat naturel (voir le mur de bibliothèque dans le salon), sans oublier un refuge mental. Et la source de ses légitimes aspirations.

Année : 2023

Avec : Bertrand Belin, Dominique Reymond, Guang Huo, Laurence Côte, Marie Rivière, Melvil Poupaud, Nathalie Richard, Philippe Uchan, Romane Bohringer, Virginie Efira, Virginie Ledoyen, Zoé Lenoir

Récemment en mars
 

L'Amour et les Forêts

Télévision : 8 mars à 13:19-15:01 sur Canal +

film : drame

Lors d'une soirée, Blanche rencontre le beau Grégoire dont elle tombe aussitôt amoureuse. La jeune femme, qui vit au bord de la mer avec sa mère et sa soeur jumelle, décide très vite de passer un cap en acceptant la proposition de son amoureux d'emménager avec lui dans l'Est de la France. D'abord fusionnelle et idyllique, la relation du couple change après la naissance de leurs deux enfants. Blanche découvre une facette de son mari qu'elle ne soupçonnait pas jusque-là. Grégoire devient possessif et très jaloux, allant jusqu'à espionner ses moindres faits et gestes, transformant sa vie en enfer... - Critique : Le patronyme trompe son monde, qui fait de Grégoire Lamoureux (Melvil Poupaud) un amoureux par définition. Tel un prince nommé Charmant, le voilà qui emballe Blanche Renard (Virginie Efira), l’épouse, et la déracine aussi sec. Au revoir la côte normande, Rose la sœur jumelle et le bleu de la mer ; bonjour les mystères de l’Est, Metz, Nancy et leurs profondeurs d’émeraude. L’Amour et les Forêts (titre sublime) s’ouvre sur cette esquisse de conte auquel ne manque que le loup. Lequel va sortir du bois et percer bientôt sous la peau du gentil mari, puisque le film, comme le roman à succès d’Éric Reinhardt dont il est adapté, narre l’emprise d’un homme toxique sur sa victime réduite à feu doux. Sujet actuel et, semble-t-il, inépuisable, l’enfer conjugal se révèle rarement aussi percutant, à l’écran, que lorsqu’il embrasse le cinéma de genre, option western domestique (Jusqu’à la garde, de Xavier Legrand, 2018), science-fiction féministe (Invisible Man, de Leigh Whannell, 2020) ou comédie musicale pour marionnette (Annette, de Leos Carax, 2021). En s’aventurant du côté du thriller, Valérie Donzelli réussit son coup avec ce sixième long métrage sélectionné à Cannes Première, huit ans après la déconvenue de Marguerite et Julien en compétition. C’est son meilleur depuis le mélo pop La guerre est déclarée (2011). Question de style, de stylisation même. Sur un scénario coécrit avec Audrey Diwan (L’Événement), qui tord le cou au récit d’origine en lui offrant une issue radicalement différente, la cinéaste pulvérise le réel et préside à la collision d’univers disparates. Un peu comme si elle croisait Demy, Rohmer et Hitchcock, mâtinant leur rencontre d’un zeste flamboyant de giallo à la Dario Argento en procédant par éclats de couleur – beau travail du directeur de la photographie Laurent Tangy. Demy, donc. Rien ne dit que ces jumelles soient nées sous le signe des Gémeaux. Il n’empêche. Blanche est blonde, romantique, attentiste, quand Rose (Efira itou) penche vers le vénitien et se distingue par sa vivacité entreprenante. Loin de Rochefort mais près des flots, les frangines incarnent le jour et la nuit réunis autour d’un astre maternel échappé du Rayon vert (Marie Rivière, transfuge rohmérienne, comme Poupaud). Demy à nouveau : un voile de mariée, le temps d’un plan, convoque la Geneviève des Parapluies de Cherbourg. Demy toujours : muté à Metz, l’employé de banque Lamoureux conduit Blanche, enceinte, vers cet ailleurs en entonnant une déclaration chantée. « À notre nouvelle vie, qui commence aujourd’hui / On s’aime pour la vie », tralala incongru qui ne se répétera pas. Fausse piste. Très tôt, le montage a livré un fait d’importance : cet amour fou se raconte à l’imparfait. « Il était insatiable et d’une tendresse infinie », confie l’intéressée pour expliquer son ravissement passé. Sous la plume d’Éric Reinhardt, elle échangeait par mail avec un écrivain. Chez Donzelli, elle s’ouvre à une femme incarnée par la merveilleuse Dominique Reymond, aînée rassurante, empathique gardienne de la loi – on pense au personnage d’Anouk Grinberg dans La Nuit du 12, de Dominik Moll (2022). Blanche lui raconte l’isolement progressif, les mesquineries incessantes, la surveillance jalouse. Dans ses souvenirs, les couleurs des jours heureux – jaune soleil, rouge désir – s’assombrissent, jusqu’à la terreur filmée comme un trou noir : Lamoureux emporte sa femme pied au plancher, tous phares éteints, sur une petite route engloutie par la nuit. Image persistante d’un anéantissement. L’espoir viendra du vert, soit une parenthèse érotique délicatement mise en scène, sensuelle et floue, dans les bras d’un homme des bois déniché sur Internet (pseudo Davidroute66, dépaysement garanti) qui possède le physique et la voix (aaaaah) de l’acteur-chanteur Bertrand Belin. Une incartade payée au prix fort, dans le secret du domicile où Grégoire mène les interrogatoires, cette maison seventies où le papier peint et les meubles entrechoquent les époques, produisant un effet troublant d’atemporalité. La chambre du couple, perchée sur une mezzanine fermée par un rideau, s’apparente à une scène de théâtre. Une tragédie s’y joue, un crime peut-être. Le rythme s’accélère, la menace contamine les lieux, et Valérie Donzelli, en fan de Psychose, laisse entrevoir le désespoir de son héroïne à travers le kaléidoscope d’un rideau de douche. Très docteur Jekyll et mister Hyde, Melvil Poupaud n’y va pas mollo, à raison, et transforme le « mec parfait » initial en hideux « petit monsieur », jusqu’à s’effrayer de son propre reflet dans le miroir. Dédoublée comme en écho à Madeleine Collins (Antoine Barraud, 2021), prof de lettres comme dans Les Enfants des autres (lire ci--dessous), Virginie Efira arrive à ce stade d’une carrière où les beaux rôles dialoguent les uns avec les autres. Star de proximité, elle oscille ici entre l’ombre et la lumière avec mille variations subtiles. Prof au grand cœur, un rôle qui va si bien à Virginie Efira…C’est encore la rentrée des classes pour Virginie Efira, qui rempile donc en professeure de français dans L’Amour et les Forêts après en avoir joué une dans Les Enfants des autres, en septembre dernier. Un même métier, vu sous son jour le plus gratifiant, exercé avec cœur, et qui offre, dans les deux cas, une clé intime des personnages.Privée de maternité, l’héroïne de Rebecca Zlotowski trouvait dans l’enseignement l’opportunité d’une transmission aussi précieuse pour ses élèves que consolatrice pour elle – d’où l’émotion de la séquence finale, quand un ancien disciple lui témoignait sa reconnaissance. Également « prof préférée » des lycéens, au point qu’ils lui organisent une fête surprise, la Blanche de Valérie Donzelli exprime tout autre chose par cette vocation : sa dimension romanesque. « C’est ce que j’ai toujours voulu faire », confie-t-elle au début à l’idéal Lamoureux, avant de lui citer Britannicus de mémoire. Les livres constituent à la fois son bagage (signifié, très littéralement, par des cartons à déménager), son habitat naturel (voir le mur de bibliothèque dans le salon), sans oublier un refuge mental. Et la source de ses légitimes aspirations.

Année : 2023

Avec : Bertrand Belin, Dominique Reymond, Guang Huo, Laurence Côte, Marie Rivière, Melvil Poupaud, Nathalie Richard, Philippe Uchan, Romane Bohringer, Virginie Efira, Virginie Ledoyen, Zoé Lenoir

Récemment en mars
 

L'Amour et les Forêts

Télévision : 5 mars à 23:47-01:29 sur Canal +

film : drame

Lors d'une soirée, Blanche rencontre le beau Grégoire dont elle tombe aussitôt amoureuse. La jeune femme, qui vit au bord de la mer avec sa mère et sa soeur jumelle, décide très vite de passer un cap en acceptant la proposition de son amoureux d'emménager avec lui dans l'Est de la France. D'abord fusionnelle et idyllique, la relation du couple change après la naissance de leurs deux enfants. Blanche découvre une facette de son mari qu'elle ne soupçonnait pas jusque-là. Grégoire devient possessif et très jaloux, allant jusqu'à espionner ses moindres faits et gestes, transformant sa vie en enfer... - Critique : Le patronyme trompe son monde, qui fait de Grégoire Lamoureux (Melvil Poupaud) un amoureux par définition. Tel un prince nommé Charmant, le voilà qui emballe Blanche Renard (Virginie Efira), l’épouse, et la déracine aussi sec. Au revoir la côte normande, Rose la sœur jumelle et le bleu de la mer ; bonjour les mystères de l’Est, Metz, Nancy et leurs profondeurs d’émeraude. L’Amour et les Forêts (titre sublime) s’ouvre sur cette esquisse de conte auquel ne manque que le loup. Lequel va sortir du bois et percer bientôt sous la peau du gentil mari, puisque le film, comme le roman à succès d’Éric Reinhardt dont il est adapté, narre l’emprise d’un homme toxique sur sa victime réduite à feu doux. Sujet actuel et, semble-t-il, inépuisable, l’enfer conjugal se révèle rarement aussi percutant, à l’écran, que lorsqu’il embrasse le cinéma de genre, option western domestique (Jusqu’à la garde, de Xavier Legrand, 2018), science-fiction féministe (Invisible Man, de Leigh Whannell, 2020) ou comédie musicale pour marionnette (Annette, de Leos Carax, 2021). En s’aventurant du côté du thriller, Valérie Donzelli réussit son coup avec ce sixième long métrage sélectionné à Cannes Première, huit ans après la déconvenue de Marguerite et Julien en compétition. C’est son meilleur depuis le mélo pop La guerre est déclarée (2011). Question de style, de stylisation même. Sur un scénario coécrit avec Audrey Diwan (L’Événement), qui tord le cou au récit d’origine en lui offrant une issue radicalement différente, la cinéaste pulvérise le réel et préside à la collision d’univers disparates. Un peu comme si elle croisait Demy, Rohmer et Hitchcock, mâtinant leur rencontre d’un zeste flamboyant de giallo à la Dario Argento en procédant par éclats de couleur – beau travail du directeur de la photographie Laurent Tangy. Demy, donc. Rien ne dit que ces jumelles soient nées sous le signe des Gémeaux. Il n’empêche. Blanche est blonde, romantique, attentiste, quand Rose (Efira itou) penche vers le vénitien et se distingue par sa vivacité entreprenante. Loin de Rochefort mais près des flots, les frangines incarnent le jour et la nuit réunis autour d’un astre maternel échappé du Rayon vert (Marie Rivière, transfuge rohmérienne, comme Poupaud). Demy à nouveau : un voile de mariée, le temps d’un plan, convoque la Geneviève des Parapluies de Cherbourg. Demy toujours : muté à Metz, l’employé de banque Lamoureux conduit Blanche, enceinte, vers cet ailleurs en entonnant une déclaration chantée. « À notre nouvelle vie, qui commence aujourd’hui / On s’aime pour la vie », tralala incongru qui ne se répétera pas. Fausse piste. Très tôt, le montage a livré un fait d’importance : cet amour fou se raconte à l’imparfait. « Il était insatiable et d’une tendresse infinie », confie l’intéressée pour expliquer son ravissement passé. Sous la plume d’Éric Reinhardt, elle échangeait par mail avec un écrivain. Chez Donzelli, elle s’ouvre à une femme incarnée par la merveilleuse Dominique Reymond, aînée rassurante, empathique gardienne de la loi – on pense au personnage d’Anouk Grinberg dans La Nuit du 12, de Dominik Moll (2022). Blanche lui raconte l’isolement progressif, les mesquineries incessantes, la surveillance jalouse. Dans ses souvenirs, les couleurs des jours heureux – jaune soleil, rouge désir – s’assombrissent, jusqu’à la terreur filmée comme un trou noir : Lamoureux emporte sa femme pied au plancher, tous phares éteints, sur une petite route engloutie par la nuit. Image persistante d’un anéantissement. L’espoir viendra du vert, soit une parenthèse érotique délicatement mise en scène, sensuelle et floue, dans les bras d’un homme des bois déniché sur Internet (pseudo Davidroute66, dépaysement garanti) qui possède le physique et la voix (aaaaah) de l’acteur-chanteur Bertrand Belin. Une incartade payée au prix fort, dans le secret du domicile où Grégoire mène les interrogatoires, cette maison seventies où le papier peint et les meubles entrechoquent les époques, produisant un effet troublant d’atemporalité. La chambre du couple, perchée sur une mezzanine fermée par un rideau, s’apparente à une scène de théâtre. Une tragédie s’y joue, un crime peut-être. Le rythme s’accélère, la menace contamine les lieux, et Valérie Donzelli, en fan de Psychose, laisse entrevoir le désespoir de son héroïne à travers le kaléidoscope d’un rideau de douche. Très docteur Jekyll et mister Hyde, Melvil Poupaud n’y va pas mollo, à raison, et transforme le « mec parfait » initial en hideux « petit monsieur », jusqu’à s’effrayer de son propre reflet dans le miroir. Dédoublée comme en écho à Madeleine Collins (Antoine Barraud, 2021), prof de lettres comme dans Les Enfants des autres (lire ci--dessous), Virginie Efira arrive à ce stade d’une carrière où les beaux rôles dialoguent les uns avec les autres. Star de proximité, elle oscille ici entre l’ombre et la lumière avec mille variations subtiles. Prof au grand cœur, un rôle qui va si bien à Virginie Efira…C’est encore la rentrée des classes pour Virginie Efira, qui rempile donc en professeure de français dans L’Amour et les Forêts après en avoir joué une dans Les Enfants des autres, en septembre dernier. Un même métier, vu sous son jour le plus gratifiant, exercé avec cœur, et qui offre, dans les deux cas, une clé intime des personnages.Privée de maternité, l’héroïne de Rebecca Zlotowski trouvait dans l’enseignement l’opportunité d’une transmission aussi précieuse pour ses élèves que consolatrice pour elle – d’où l’émotion de la séquence finale, quand un ancien disciple lui témoignait sa reconnaissance. Également « prof préférée » des lycéens, au point qu’ils lui organisent une fête surprise, la Blanche de Valérie Donzelli exprime tout autre chose par cette vocation : sa dimension romanesque. « C’est ce que j’ai toujours voulu faire », confie-t-elle au début à l’idéal Lamoureux, avant de lui citer Britannicus de mémoire. Les livres constituent à la fois son bagage (signifié, très littéralement, par des cartons à déménager), son habitat naturel (voir le mur de bibliothèque dans le salon), sans oublier un refuge mental. Et la source de ses légitimes aspirations.

Année : 2023

Avec : Bertrand Belin, Dominique Reymond, Guang Huo, Laurence Côte, Marie Rivière, Melvil Poupaud, Nathalie Richard, Philippe Uchan, Romane Bohringer, Virginie Efira, Virginie Ledoyen, Zoé Lenoir