Télévision : 22 février 2018 à 00:40-02:25 sur Canal +

film : drame

Immersion tragique dans les quartiers difficiles de Marseille. A la manière de Ken Loach, Karim Dridi observe la fatalité sociale. Avec humanité. Critique : Ça commence comme on voudrait que ça finisse. Avec une lueur d'espoir. Sofiane, la vingtaine, a pu s'arracher, par le mérite et les études, à la cité-ghetto où il a grandi, aux portes de Marseille. Son retour, pour les vacances, a des allures de triomphe romain. La famille et les copains restés coincés au pied des tours l'applaudissent comme s'il était une sorte de miracle isolé. Presque un étranger, déjà... Quand le frère de Sofiane, petit caïd local, est assassiné en pleine rue, le joli conte éclate. Pour « faire son deuil », le jeune homme décide de rester. Il veut comprendre, se venger. Se mêler, donc, de ce qui ne le regarde plus. Très vite, « l'ascenseur social » décroche et plonge tout droit dans la tragédie pure. Le réalisateur Karim Dridi, qui, après Bye-bye et Khamsa, décrit pour la troisième fois un Marseille résolument antifolklorique, est un grand amoureux de Ken Loach. L'influence du maître est partout. Dans le vibrant désir d'approcher la vérité d'une fatalité sociale. Dans le choix d'un casting presque entièrement composé de non-professionnels, dont la présence crève l'écran — mention spéciale à Foued Nabba, d'un calme glaçant en petit « parrain » local... En arabe, chouf signifie « regarde », mais désigne aussi les guetteurs, souvent terriblement jeunes, qui s'assurent, dans les quartiers, que la police ne viendra pas déranger le trafic. Drogue, armes lourdes et vies foudroyées : avec ce film, qui mêle une rugosité quasi documentaire à la noirceur du polar, Karim ­Dridi sort la violence de la colonne des faits divers pour lui rendre toute sa perturbante humanité. — Cécile Mury

Année : 2016