Télévision : 4 décembre 2017 à 13:35-16:05 sur Arte

film policier

Gu s'évade de taule. Il voudrait changer de vie. Melville, cinéaste de l'épure, filme un Lino Ventura immense et bouleversant. Un grand film noir et désespéré. Critique : Film de Jean-Pierre Melville (France, 1966). Scénario : José Giovanni. 145 mn. NB. Avec Lino Ventura : Gu. Paul Meurisse : l'inspecteur Blot. Raymond Pellegrin : Ricci. Christine Fabréga : Manouche. Michel Constantin : Alban. Genre : affranchi. Y a pas à tortiller : il y a les cinéastes baroques, ceux qui remplissent le cadre, et puis les ascètes, qui bazardent tout. A cette époque, ceux qui se chargent des soustractions s'appellent Becker, Bresson, Franju et Melville. Ils font le vide, raréfient les dialogues, amenuisent tout jeu expressif. Eliminer, liquider, Melville aime forcément ça, lui si féru de polar, lui qui l'accommode si bien à l'humeur française. Le Deuxième Souffle, pépite grise, inaugure sa deuxième période, celle de l'épure à tous les étages - voyez les planques désolées et le désert de cailloux de l'arrière-pays. Le récit, lui, est diablement sinueux (coup de chapeau à José Giovanni). Trajets incessants (en caisse, bus, avion), allers-retours entre Paris et Marseille. Gestes magnifiés, accolades, poings tendus. La bagarre, qui exige d'avoir un coup d'avance, se fait surtout à l'intérieur de chaque camp. Car l'inspecteur Blot (impérial Paul Meurisse) et Gu (Lino, ah ! Lino...) s'estiment, chacun respectant chez l'autre son sens du devoir. Alors pourquoi « deuxième souffle » ? Gu n'est plus tout jeune, il peine lors de son évasion, il transpire de peur. Il arrive malgré tout à se renflouer en criblant de bastos deux caves et un motard. Brutal, il l'est ; traître, jamais. L'honneur, c'est sa raison d'être, sa compagne. Les femmes ? Il n'y en a qu'une, Manouche (Christine Fabréga, amère, un peu vulgaire, parfaite), prête à tout pour protéger son Gu. Amour aveugle. Blot tente de la raisonner et lui ment, pour son bien, pour la conquérir aussi. Notons qu'un remake - très momifié - de Corneau est actuellement à l'affiche. Jacques Morice

Année : 1966